Français: Blog sur la thèse de doctorat d'Eric Pasquati, dont le thème est l'appropriation des technologies de l'information et de la communication (TIC) par des agriculteurs ouest-africains.

English: Eric Pasquati's PhD concerning the appropriation of ICT by farmers in West Africa. Please, fell free to leave your comments in English.

Português: Tese de doutorado de Eric Pasquati sobre a apropriação das tecnologias da informação e da comunicação (TIC) pelos agricultores da
África do Oeste. Será um prazer discutir também em Português sobre o tema.

Español: Tesis de doctorado de Eric Pasquati sobre la
apropiación de las tecnologías de información y de la comunicación (TIC) por los agricultores del África de l'Oeste. Sientan la libertad de dejar también sus comentarios en español.

15 mai 2009

Bill Cooke - limites psychologiques des méthodes participatives

Bill Cooke a organisé en 2001 un ouvrage avec Uma Kothari appelé "Participation: the new tyranny?" critiquant la mode d'application de méthodes participatives dans le domaine du développement. Le 7ème chapitre de ce livre, écrit par Bill Cooke lui-même, est dédié à la description de 4 risques des méthodes participatives liés au travail de prise de decision en groupe, et expliqués par la psychologie sociale. Le raisonnement de Bill Cooke dans ce chapitre me semble particulièrement intéressant pour susciter chez les praticiens et les chercheurs des précautions par rapport à l'application de méthodes participatives, mais ces risques ne mettent pas en question, à mon avis, l'intérêt de telles méthodes, surtout quand on considère l'importance de la participation pour l'appropriation des processus de développement par les agents locaux.

Les 4 risques décrits par Bill Cooke sont:

le "risky shift": le fait que les décisions prises en groupe on tendance à être plus risquées que celles prises individuellement. Plusieurs raisons sont avancées selon le contexte. Aux EUA, par exemple, la prise de risque est valorisée socialement et donc les personnes dans une discussion en groupe auraient tendance à vouloir se montrer plus propices à la prise de risque que elles les sont en vérité. Une autre raison que me semble plus général et que probablement joue un rôle dans la majorité des cas, indépendamment de l'origine des participants, est le fait que dans des décisions prises en groupe la responsabilisation des acteurs individuels peut sembler diminuée, en autres termes, les individus peuvent se sentir moins responsables par la décision prise en groupe et donc se sentir, chacun à son tour moins préoccupé avec les risques de la décision, ce qui donne comme résultat général la prise d'une décision plus risquée.

le "paradoxe d'Abilene": le fait que, d'après des intentions individuelles de correspondre à une volonté supposée du groupe, les décisions prises en groupe peuvent être à l'opposé des volontés individuelles. La volonté tout à fait légitime des membres d'un groupe à arriver à un consensus peut donner lieu à un effet indésirable: par un manque de compréhension mutuelle, chaque individu exprime un avis contraire à son opinion personnelle en voulant plaire à ses compagnons. La contagion mentale de cet état d'esprit peut aboutir à une décision qui finalement n'était soutenu véritablement par aucun des membres du groupe!

le "groupthink": l'attachement ferme du groupe à des idées ou des schémas mentaux spécifiques peut engendrer un manque de fléxibilité et d'ouverture qui les améne à rejetter, à partir d'une réaction emotionnelle, toute idée contraire à celles établies. Lorsque ce niveau d'attachement et d'identification idéologique est atteint dans un groupe, même des critiques venant des membres du propre groupe seront fermement rejetées, à un tel point que les membres se sentiront de moins en moins à l'aise pour présenter ouvertement des nouvelles critiques.

la "persuasion coercitive": le fait que l'art de la rhétorique peut être utilisé pour manipuler le groupe dans la prise de décision. Ainsi l'individu le plus communicatif et éloquent peut dominer la discussion et finalement faire passer ses idées comme celles portant la légitimité du choix collectif. Dans les projets de développement, cela nous ramène à la diversité des acteurs, en particulier les différences formelles et cognitives entre acteurs locaux et extérieurs: même sans le vouloir et indépendamment du niveau d'effort qu'il fasse pour minimiser son influence dans la prise de décision, l'animateur d'un groupe de discussion joue un rôle fondamental dans la conduction des échanges et la construction des décisions.

Ce sont certainement des points intéressants à prendre en compte dans tout travail en groupe,et particulièrement dans les méthodes participatives appliquées aux projets de développement. Je garde toutefois l'impression que ces réserves ne nient pas l'intérêt des méthodes participatives; elles montrent simplement qu'elle ne doivent pas être appliquées de façon naïve.

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