J'ai été à la conférence
ICTD 2009, et quelques idées de Mike Powell, directeur du programme
IKM Emergent, me semblent très intéressantes. Voici ce qu'il a développé pendant le premier panel de la conférence, intitulé "Généalogie de la recherche en TIC pour le développement: prémisses, prédispositions et paradoxes". Dans cette occasion Mike Powell a exploré principalement la liaison entre les TIC et la notion de développement.
Tout d'abord il a dit qu'on est arrivé finalement à un consensus: TIC pour le développement ne s'agit pas d'un transfert rigide de technologies d'un endroit à l'autre, mais plutôt de l'adaptation et l'innovation à chaque occasion. Powell souligne que dans ces processus d'adaptation et forcement d'innovation dans la construction des usages effectifs des TIC, il faut s'attendre à ce qu'il appelle des
développements inattendus. Il donne l'exemple de la révolution verte qui, même étant considérée un grand succès de par l'augmentation des rendements de la production agricole, a engendré des dégats environnementaux considérables. En bref, ne pas avoir une vision naïve et romantique de l'utilisation des TIC, mais être vigilant aux conséquences inattendues.
Ensuite il a parlé de sa vision de développement. Pour Powell, les résultats des efforts de développement doivent s'exprimer en dernière instance par un rétrécissement de la distance entre les riche et les pauvres. Selon lui, le développement doit se présenter comme des
changements transformateurs de la condition de vie des populations en question. Ainsi, en ce qui concerne les ICTD (TIC pour le développement), il considère qu'il s'agit de la recherche, de la discussion et de la mise en oeuvre de
changements informationnels possibles dans la realité en question.
Powell s'inspire des idées d'Amartya Sen pour identifier le développement avec l'action de "
removing unfreedoms and providing choices". Powel soulinge alors une question culturelle importante qui écarte la communauté des TIC de cette notion de développement. Selon lui, la
communauté d'ingénieurs caractéristique du secteur des TIC est
habituée à modeliser des problèmes et
à rechercher des solutions objectives pour ces problèmes. Or, Powell dit que
"there are notions of development which don't suppose a series of problems requiring solutions, but a series of social processes which empower people and give them the capacity to make choices that they need to make to make their lives go forward". Il existerait une déséquilibre entre la façon de faire des ingénieurs (à la recherche de solutions) et cet objectif de rendre possible des choix. Selon Powell il serait nécessaire de
passer de la logique du "I give you" à la logique du "we work on this together".
Powell souligne également le fait qu'il y a toujours une dimension ethique dans les processus de développement. Ces processus sont généralement présentés comme des situations "gangant-gangant", mais souvent ils bénéficient beaucoup plus une partie que les autres. Alors, il y aurait place pour la réflexion sur le rétrécissement ou l'élargissement de la distance entre les différents parties prenantes, en ce qui concerne les enjeux de pouvoir des processus de développement.
Finalement, Powell attire l'attention à la nécessité de revoir la formulation des termes de références des recherches établis par les bailleurs de fonds. Il dit que les bailleurs sont souvent très normatifs et contradictoires dans leurs demandes: "please have a wonderful creative research program but tell us exactly what the outputs will be in advance", ou "work in participatory ways with other people, but tell us what they are going to say in advance". Powell dit que la demande de transparence et de responsabilité (accountability) est complètement légitime, mais qu'il faudrait formuler ces demandes façon à permettre la réalisation de recherches créatives.